2025 11 01 Une invention nommée Jésus par Nicolas Bourgeois
- Écrit par BRUYERE
Une invention nommée Jésus par Nicolas Bourgeois
Notre ami Nicolas Bourgeois a publié en 2008 un ouvrage d’exégèse rationaliste sur Jésus, puis a fait un retirage en 2017. Il est complété par un résumé de sa thèse dans une autre publication. Il n’a pas pris une ride et sa lecture est très agréable. Je ne puis que vous recommander sa lecture.
L’auteur tente de se frayer un chemin original entre les Mythistes et les Mythomanes. Il met en avant un « Jésus historique », qui n’a nullement existé, sur lequel il n’y a aucune preuve réelle et intangible de son existence. « Le Jésus historique n’est pas un personnage, c’est un domaine de recherches. Il serait plus juste de parler du « Jésus des historiens. »
Pour lui, les Mythistes « voient en Jésus comme un personnage construit tardivement (deuxième siècle ou après) à partir de mythes païens, grecs, romains, égyptiens, perses, etc.. ». Nous donnerons volontiers la parole à ceux qui voudraient soutenir en argumentant cette thèse contestée par Nicolas Bourgeois. Sapere Aude est fait pour cela.
Il démontre toutes les falsifications et interpolations dans l’Histoire pour tenter de prouver son existence. Il y en a qui sont connues, d’autres moins. « Historique » ne veut pas dire qu’il a existé, mais qu’il est incontestablement entré dans l’Histoire, en forçant quelque peu la porte. Il rappelle fort justement que Paul (Saül de Tarse » n’a jamais connu Jésus dans ses écrits, et que ses « lettres sont des ouvrages de théologie dont l’écriture s’explique aussi bien, que
Jésus ait existé ou pas. »
C’est indéniable. Dans les polémiques avec les cléricaux (j’emploie ce terme à dessein, car « l’existence de Jésus », leur sert à légitimer leurs actions dans les sociétés et les institutions), il nous a été souvent répondu que le Christianisme ne pourrait exister sans l’existence de Jésus. Or, c’est justement le cas : combien de religions, de sectes, d’affabulations ont pu voir le jour à partir de l’invention d’un personnage ou d’un fait inexistant.
Une question essentielle : le Baptême de Jésus
La question du baptême de Jésus est évoquée dans l’ouvrage, d’abord sur le thème des contradictions. « D’après Matthieu et Marc, Jean-le-Baptiste est arrêté et exécuté après avoir baptisé Jésus. D’après Luc, Jésus est baptisé par on ne sait qui après l’arrestation de Jean-le- Baptiste. L’Évangile de Jean ne parle pas du Baptême de Jésus. »
Cette question me semble déterminante pour réduire à néant la religion abrahamique en y ajoutant la question du Péché originel, où « Dieu » est le seul responsable de la Chute, puisque non seulement il laisse faire, alors qu’il pouvait intervenir pour que l’Acte maudit ne s’accomplisse pas, et que c’est lui qui l’organise. Adam et Ève et l’Humanité ad vitam sont punis pour avoir accompli le dessein du Père. Au Tribunal civil des Hommes, c’est le géniteur qui serait condamné et non sa descendance.
Dans mon étude sur le Concile de Nicée (Sapere Aude N°6), j’expliquai le problème : L’Église condamne Arius et lui donne finalement raison. La théorie du Baptême de Jésus par Jean-le- Baptiste ruine entièrement la théorie de « même substance divine » entre les trois composantes de la Trinité.
Si le Fils est de même nature divine que le Père-Dieu, cela n’a aucun sens que Jean-le- Baptiste le baptise. On ne baptise pas Dieu puisqu’il est Dieu et que c’est lui qui a inventé le baptême. Le Credo décidé à Nicée le dit clairement.
Nous croyons en un seul Dieu, Père tout-puissant, créateur de tous les êtres visibles et invisibles.
Et en un seul Seigneur Jésus-Christ, Fils unique de Dieu, né du Père, c’est-à-dire de la substance du Père,
Dieu de Dieu, lumière de lumière, vrai Dieu de vrai Dieu ; engendré, et non fait, consubstantiel au Père, par qui a été fait tout ce qui est au ciel et sur la terre ; qui pour nous, hommes, et pour notre salut est descendu, s’est incarné et s’est fait homme ; a souffert, est ressuscité le troisième jour, est monté aux cieux, et viendra de nouveau juger les vivants et les morts. Et au Saint-Esprit.
Ceux qui disent : « il y a un temps où il n’était pas, avant de naître, il n’était pas ; il a été fait comme les êtres tirés du néant ; il est d’une substance (hypostasis), d’une essence (ousia) différente, il a été créé ; le Fils de Dieu est muable et sujet au changement »,
L’Église catholique et apostolique les anathématise.
Le Fils est « genitus non factus », engendré et non pas fait. Il n’est pas « fils de l’Homme devenu Dieu », mais Dieu dès sa conception, en conséquence, on ne peut baptiser Dieu. Arius défendait la théorie qu’il était Homme devenu Dieu par le Baptême, cela avait alors un sens de faire intervenir Jean-le-Baptiste pour plonger Jésus dans le Jourdain. En clair, l’Église catholique anathématise Arius et lui donne raison en même temps. Elle est coutumière de ce gendre d’hypocrisie.
Rires et affirmations loufoques
Dans sa démonstration Nicolas Bourgeois a souvent beaucoup d‘humour, notamment quand il montre que le Nouveau-Testament est plagié sur l’Ancien, jusqu’à la caricature. Le Prophète Élisée nourrissait cent personnes avec 20 pains, alors que Jésus pour en sustenter 5 000 n’eut besoin que de cinq pains et deux poissons. Champion du Monde ! Le « Christ » devait s’appeler « Jésus » pour ressembler à « Josué », le successeur de Moïse dans l’Ancien- Testament, l’Église a tout volé à tout le monde.
Dans leur manie de mythomane pour prouver une existence qui n’a jamais été, les auteurs chrétiens nous font parfois bien sourire. Il est cité dans l’ouvrage de Joseph Klausner en 1922 que Jésus, par humilité, se prosterna devant une brique. Est-ce là la première version du « Tu es Pierre, et sur cette pierre, je bâtirai mon Église » ? La brique a précédé la pierre en lui ouvrant le chemin ?
John P.Meier, plus récemment, affirme que le Christ a accompli 33 vrais miracles. Est-ce de cela que provient le Rite Maçonnique Écossais Ancien et Accepté en 33 grades ? Chaque Grade étant « un miracle » par lui-même pour celui et celle qui le reçoit ?
Sont reprises aussi, avec intérêt, les thèses sur les falsifications, comme celle qui mélange Nazareth le village et la secte des Nazoréens, il fallait à toute force introduire le pied dans une chaussure trop petite. L’âne et le bœuf sont le produit d’un emprunt à un évangile apocryphe et la crèche (de la Nativité) n’était qu’une mangeoire pour animaux. « Le juste humilié qui souffre et meurt pour racheter les péchés de son peuple est un thème de l’Ancien-Testament » que l’on rencontre en Psaume 22 et Isaïe 53. Cela ressert pour les 4 Évangélistes reconnus officiellement par l’Église. Ces quelques exemples sont d’excellentes mises en bouche pour que vous dégustiez cet ouvrage, comme il le mérite.
L’auteur montre aussi que les références à Jésus dans les textes juifs et païens n’apparaissent que bien après la diffusion du discours chrétien. Elles ne sont que des reprises et non la preuve de l’existence de Jésus.
Rappelons une évidence pour les Libres Penseurs, il n’y a pas de vérités révélées ou établies dans l’Exégèse rationaliste, il n’y a que de nouvelles pistes et de nouvelles portes ouvertes pour la recherche. Mais tous seront d’accord avec la conclusion de l’auteur : « L’existence de Jésus est une affirmation de foi et non d’Histoire. »
Christian Eyschen
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2025 10 28 Migrants mineurs isolés à Lyon
- Écrit par BRUYERE
Migrants mineurs isolés à Lyon : La Lettre mensuelle d’informations de la Fédération du Rhône de la Libre Pensée a Interviewé le COLLECTIF SOUTIENS/MIGRANTS CROIX-ROUSSE
Propos recueillis par Xavier HYVERT ; membre du bureau de la Fédération du Rhône de la Libre Pensée.
La Fédération du Rhône de la Libre Pensée remercie le COLLECTIF SOUTIENS/MIGRANTS CROIX ROUSSE (Nommé dans la suite CSM/XR), dont elle salue l’action et son représentant, pour avoir accepté cet interview.
La lettre mensuelle : Cette interview a lieu au moment où la France vient d’être accusée par l’ONU de « violations graves » des droits des enfants migrants. Un article de Médiapart rapporte que : « Dans un rapport publié le 16 octobre 2025, le Comité des droits de l’enfant des Nations unies (CRC) affirme qu’en France, beaucoup de migrants ne pouvant accéder au système de protection de l’enfance se retrouvent sans abri, privés de soins de base et vivant dans des conditions «dégradantes ». Le CRC constate qu’un « grand nombre » de ceux qui se déclarent enfants sont traités comme des adultes, à la suite de procédures d’évaluation de l’âge jugées « défaillantes ». Alors que la loi française, selon l’ONU « considère les mineurs non accompagnés avant tout comme des enfants ayant besoin de soins et de protection ». Peux-tu, pour les lecteurs de la Lettre mensuelle d’informations de la Fédération du Rhône de la Libre Pensée, te présenter et présenter le COLLECTIF SOUTIENS/MIGRANTS CROIX-ROUSSE ainsi que les raisons de son existence, son histoire en quelques mots ?
CSM/XR : Le Collectif soutiens/migrants Croix-Rousse s'est constitué en 2018/2019 au squat de l'ancien collège Maurice Scève qui avait été « ouvert » (nous revendiquions une « réquisition citoyenne ») par des militants pour héberger des mineurs isolés qui étaient abandonnés par la Métropole de Lyon (en charge de la protection de l'enfance) et qui avaient établis un petit campement dans les jardins de la montée de la Grande Côte à la Croix-Rousse. Ce premier squat a duré deux ans, hébergeant aussi beaucoup de demandeurs d'asile qui se trouvaient à la rue (il y a eu jusqu'à 400 habitants dans ce squat). Le Collectif s'est donc constitué sur le terrain, par la pratique de l'accompagnement des habitants de ce squat et la nécessité de s'organiser, notamment pour préserver le lieu.
Le collectif a toujours eu deux axes dans ses actions : d'une part, accompagner et soutenir matériellement les personnes exilées subissant la maltraitance institutionnelle du non-accueil, par exemple en ouvrant des squats, et d'autre part, militer, organiser des manifestations, médiatiser la situation pour revendiquer un accueil digne des exilés dans notre pays et, a minima, le respect des droits fondamentaux pour toutes et tous.
La lettre mensuelle : Pourrais-tu décrire la situation des migrants que vous aidez et les différentes actions que vous menez avec le Collectif?
CSM/XROUSSE : Aujourd'hui, nous nous concentrons sur le soutien aux mineurs isolés en recours : ces jeunes se présentant comme mineurs et dont la prise en charge est refusée par la Métropole qui, au terme d'une évaluation contestable (un simple entretien), met en doute leur minorité. Pendant la durée de leur recours en justice qui peut durer 6 mois à un an, les jeunes sont abandonnés des institutions, dans une zone grise du droit car « ni mineur, ni majeur », sans aucune ressource. Pourtant, une majorité d'entre elles et eux seront bien reconnus mineurs par la justice des enfants au terme de la procédure de recours.
Le Collectif revendique l'application du principe de présomption de minorité, comme le préconise la Défenseure des Droits, c'est à dire que ces jeunes soient considérés comme mineurs et pris en charge par la protection de l'enfance jusqu'à la fin de leur recours en justice.
C'est parce que la France ne respecte pas ce principe énoncé par la Convention Internationale des Droits de l'Enfant qu'elle a été condamnée à plusieurs reprises par l'ONU et la Cour Européenne des Droits de l'Homme (CEDH).
Depuis la fin de l'occupation de l'ancien collège en 2020, le Collectif a ouvert 4 squats, lieux d'hébergement pour les mineurs en recours, dont 3 sont aujourd'hui fermés et géré également deux lieux mis à disposition par les propriétaires, toujours dans des bâtiments vacants inutilisés depuis plusieurs années. Sur ces lieux, le Collectif achète la nourriture pour que les jeunes puissent préparer un repas collectif par jour, paye les fluides (énergie, eau) et les travaux éventuels pour entretenir les bâtiments, fournit les produits d'entretien (hygiène corporelle et ménagère) avec un peu d'aide de la Croix-Rouge, des crédits pour le téléphone,... Actuellement nous hébergeons ainsi 85 jeunes (60 garçons et 25 filles) dans deux lieux.
Malheureusement cela ne suffit pas pour héberger tous les jeunes (quelques centaines à Lyon) et depuis 3 ans, se constituent des campements de mineurs en recours dans la ville de Lyon, pour lesquels nous achetons les tentes, fournissons le minimum pour l'hygiène et l'équipement contre le froid, organisons les dons du voisinage sur place,...
Actuellement, 250 à 300 jeunes (sur)vivent au campement des Chartreux à la Croix-Rousse.
La lettre mensuelle : Pourrais-tu apporter des précisions sur les coûts de revient des actions que vous menez ?
CSM/XR : Actuellement nous dépensons environ 6000 euros par mois pour l'accompagnement des presque 400 jeunes que nous soutenons. A titre d'exemple, une bouteille de gaz nous coûte 37 €, nous en achetons 3 par semaine pour le squat du Pa55age, une tente 2 places vaut 30 €, nous en achetons presqu'une cinquantaine par mois pour le campement, un sac de riz de 20 kilos nous coûte 28 €, nous en consommons 4 par semaine pour le Pa55age et un pour la maison des filles, cette semaine nous avons voté un budget de 700 euros pour acheter des bouillottes aux jeunes du campement,...
Nous ne touchons pas de subvention des institutions, tout est financé par la solidarité de particuliers (ou parfois d'organisations militantes comme la vôtre). Nous avons une cagnotte en ligne et nous organisons des fêtes et événements pour visibiliser la situation des jeunes et récolter des fonds, les dons déclarés peuvent faire l'objet de rescrits fiscaux..
La lettre mensuelle : Souhaites-tu ajouter quelque chose?
CSM/XROUSSE : Notre première banderole, déployée lors d 'une séance du conseil métropolitain disait « Nous ne ferons pas le travail à votre place ». 7 ans plus tard, nous faisons encore beaucoup trop à la place des institutions, mais nous militons toujours pour que celles-ci assument leurs responsabilités afin que nous puissions disparaître.
Il s'agit, à Lyon, de prendre en charge 300 à 400 jeunes qui ne souhaitent qu'aller à l'école, se former pour apprendre un métier et vivre parmi nous. Rien d'insurmontable à nos yeux pour une Métropole de 1,5 millions d'habitants.
Dans l'hexagone, nous estimons à 3500 le nombre de mineurs isolés « en recours » abandonnés des institutions. Pour accompagner 400 jeunes le Collectif Soutiens/Migrants Croix-Rousse estime le besoin à 72.000€ par an soit 180€ par personne.
La lettre mensuelle vous remercie de ce temps d'interview, LA FEDERATION DU RHÔNE DE LA LIBRE PENSEE VOUS APPELLLE A SOUTENIR FINANCIEREMENT LE COLLECTIF SOUTIENS/MIGRANTS CROIX-ROUSSE en cliquant sur https://www.payasso.fr/librepensee69/doncomitemigrants
Les sommes collectées par la Libre Pensée du Rhône lui seront intégralement reversées.
2025 11 02 LA CRYPTE DES BROTTEAUX
- Écrit par BRUYERE
A propos d’un article de France Info : La crypte des Brotteaux
Les journalistes aiment bien parler de trumpisation des esprits, pour dissimuler que les fabricants d’idéologie bataillent dur et ferme pour inculquer les idées d’extrême droite, réactionnaires, dans les esprits. Nous en avons un bon exemple avec un article de France Info le 12/10 sur le soulèvement des monarchistes contre la République à Lyon en 1793.
Après avoir restauré la statue de Louis XIV place Bellecour présentée comme un symbole lyonnais par le maire de Lyon et le président de la métropole, « l’air du temps » amène comme par hasard une émission de France Info qui nous parle d’un lieu de mémoire du « massacre des lyonnais » par la république en 1793, la crypte des Brotteaux.
Les faits sont rapportés de façon apparemment objective, (interview d’ecclésiastiques), en fait très mensongère, puisqu’il est question de la reprise de la ville passée aux mains des monarchistes, par les troupes de la République, sans dire un mot de ce qu’il se passe à ce moment là dans le pays et en Europe. La contre-révolution à Lyon et partout en France tente d’abattre cette République qui a osé abolir les privilèges de la noblesse et du clergé, et proclamer les droits de l’homme et du citoyen qui sont désignés comme un crime contre Dieu par le pape.
Il se trouve que Marcel Picquier, décédé l’an dernier, a écrit un livre sur Joseph Chalier, leader des sans culottes lyonnais de 1793, qui donne un aperçu complet clair et documenté de ces événements de Lyon. Il donne aussi une analyse des falsifications de l’Eglise répétées depuis , et que le reportage de France Info reprend intégralement.
Résumons: La lutte entre Girondins et Montagnards se crispe lorsque les Girondins cherchent à protéger le roi après son arrestation lors de sa fuite à Varennes. Les girondins engagent la guerre pour sauver le roi qui tourne au désastre après la trahison de certains généraux qui pactisent avec les troupes prussiennes et autrichiennes. C’est le signal de l’offensive tous azimuts contre la République , en Vendée, à Toulon, partout ou c’est possible.
A Lyon la lutte entre les Montagnards et les Girondins est vive, et contrairement à Paris, ce sont les Girondins qui l’emportent, en organisant un coup de force. Ils procèdent à l’arrestation des Montagnards, de Chalier le leader des sans-culotte et du maire Bertrand. Chalier qui n’a jamais fait exécuter personne est guillotiné. Les girondins organisent une répression massive et toutes les forces monarchistes se précipitent à Lyon qui passe sous le contrôle du général monarchiste de Percy et du clergé réfractaire (la partie du clergé qui appelle à la guerre sainte contre la République). La Convention engagée dans la résistance face à l’invasion extérieure et à la guerre civile intérieure doit envoyer une armée pour reprendre Lyon, noeud stratégique entre Paris et le midi, les frontières de l’Est et l’Italie. Les combats font rage et se terminent par la défaite des monarchistes et du clergé.
Quelques extraits du livre de Marcel Picquier sur joseph Chalier et ses amis: (éditeur: fédération départementale du Rhône de la Libre Pensée)
La rebellión royaliste lyonnaise
« La rebellión lyonnaise qui abat la municipalité jacobine est une coalition de contre-révolutionnaires, d’ex-révolutionnaires - feuillants ou girondins - de fabricants, de leurs commis et domestiques, de clercs, de négociants et banquiers satisfaits d’avoir conquis le pouvoir réel et de s’être appropriés les biens nationaux à très bon marché, en raison de la dépréciation des assignats. Il faut ajouter le clergé à cette liste; il avait ,certes, souffert de la confiscation de ses biens et de la Constitution civile du Clergé, mais à Lyon les liens étaient depuis toujours, étroits avec la bourgeoisie : d’ailleurs lorsque Linsolas, le vicaire général de l’Archevêque de Marbeuf, en exil, qui ne mettra jamais les pieds dans sa ville, sera emprisonné, le maire Vittet, pourtant futur élu à la Convention, le fera discrètement libérer. Et ce vicaire général jouera un rôle de premier plan dans la résistance royaliste à la Convention, grâce à la masse de manoeuvre de plusieurs milliers de prêtres réfractaires cachés à Lyon et très actifs (…)
Le 29 mai, les rebelles rassemblés à Bellecour, sous la présidence de l’avocat Fréminville, un royaliste, organisent trois colonnes d’hommes armés. En empruntant les quais, ils marchent sur l’Hotel de ville qui tombera le soir même au prix de 45 morts et115 blessés.
Chaliier et ses amis, dont le maire Bertrand, sont jetés en prison. La population ouvrière cherchera à défendre son leader: le 2 juillet, encore à l’instigation des sections du Gourguillon et de St Georges, une foule d’hommes et de femmes se dirige sur la prison de la Roanne en criant : Vive Marat, vive Chalier. Le procureur de la Commune met 10 000 hommes sous les armes, les forme en haie, braque un canon et désarme 200 citoyens environ. » (p 53-54)
« Le 8 juillet le colonel de Précy, un royaliste notoire, est nommé général de l’armée lyonnaise. Il s’entoure d’officiers supérieurs royalistes bien connus, comme le marquis de Virieu en dépit du fait qu’il rentre d’émigration et s’est compromis par son royalisme ardent (…)
Le 10 juillet , Lyon franchit le pas et se joint aux fédéralistes en envoyant à Bourges deux commissaires pour participer à la formation, contre la Convention, d’une autre assemblée nationale à Bourges. Le 16 juillet, Chalier est guillotiné. Les ponts sont rompus définitivement avec la Convention qui fait de Chalier, aux cotés de Marat poignardé le 13 juillet et Le Pelletier de Saint Fargeau, assassiné pour avoir voté la mort du roi, un martyr de la Révolution.
Lé 2 octobre Couthon arrive à Lyon et ordonne l‘attaque à outrance. Dans la nuit du 8 au 9 octobre, le général de Précy tente une sortie avec 700 hommes. Son arrière garde commandée par le marquis de Vireu est anéantie. Les effectifs de la colonne fondent rapidement sous les assauts des détachements de cavalerie et des paysans appelés aux armes par le tocsin contre les nobles de retour. De Précy disparait aux environs de Feurs. Il y aurait eu 50 survivants. Le 9 octobre la ville est prise. « ((p57-58)
La répression
« La répression fera officiellement 1876 victimes, fusillées ou mitraillées aux Brotteaux, guillotinées parce Bellecour ou place des Terreaux.
Faut-il parler d’une répression barbare et aveugle? Non. Lyon n’était pas le seul lieu de la Nation où le sort de la République se jouait les armes à la main. Pour la Convention révolutionnaire et ses représentants en mission, la question, en ces mois de 1793, était de sauver la République attaquée de tous cotés et par la coalition réactionnaire de toute l’Europe ou de périr avec elle. Ce ne sont pas les révolutionnaires qui avaient commencé la guerre civile. Ils avaient à la gagner.
C’est ici qu’il faut rappeler les paroles célèbres que Gracchus Babeuf qui venait d’assister aux scènes d’émeutes joyeuses mais sanglantes du 14 juillet 1789, adresse le même jour à sa femme: « Oh que cette joie me faisait mal ! J’étais tout à la fois satisfait et mécontent. Je disais tant mieux et tant pis. Je comprend que le peuple fasse justice, j’approuve cette justice lorsqu’elle est satisfaite par l’anéantissent des coupables, mais pourrait-elle aujourd’hui n’être pas cruelle? Les supplices en tout genre, l’écartèlement, la torture, la roue, les buchers, le fouet, les gibets, les boureaux multipliés partout, nous ont fait de si mauvaises moeurs! Les maitres au lieu de nous policer nous ont fait barbares, parce qu’ils le sont eux-mêmes. Ils récoltent et récolteront ce qu’ils ont semé car tout cela ma pauvre femme, aura ce qu’il parait des suites terribles : nous n’en sommes qu’au début. »
La commission de Justice Militaire, nommée par Couthon qui jugea les rebelles pris les armes à la main siégea jusqu’au 28 novembre et prononça 106 condamnations sur 156 jugements… A partir du 30 octobre, Fouché et Collot d’Herbois succèdent à Couthon et accélèrent la répression … Cette juridiction est responsable de 1684 condamnations à mort. » (p64-65)
La Défense de la cause royale
M Picquier donne ensuite une analyse détaillée des catégories sociales frappées par la répression, car l’Eglise a soutenue que les victimes « exerçaient d’humbles métiers ». Si des petites gens ont été frappées, pour l’essentiel ce sont les nobles, les membres du clergé et la bourgeoisie qui ont été condamnées, pour leur participation à la contre révolution et non pour leurs opinions religieuses. Ce qui est aussi dissimulé par les historiens de l’Eglise c’est la terreur blanche après Thermidor. Nous renvoyons à l’ouvrage sur Chalier pour suivre cette répression occultée. Puis à partir de 1819, un monument est édifié « A la gloire de Dieu, A la mémoire des victimes du siège de Lyon, 1793 ». En tête des souscripteurs figuraient les noms du comte d’Artois (futur Charles X), du duc et de la duchesse d’Angoulême. Puis une crypte dans l’Eglise des Brotteaux a recueilli les ossements des « martyrs » du siège « pour transmettre à la postérité le souvenir du siège mémorable qu’a soutenue la ville de Lyon pour la défense de la cause royale »
C’est en 1969 qu’un maire de Lyon Louis Pradel fit adopter un financement pour cette chapelle. Le 4 avril 1987, le Duc d’Anjou, ainé de la maison de Bourbon, est venu s’incliner et déposer une gerbe devant l’ossuaire.
On remarque dans le reportage de France Info, un appel des ecclésiastiques pour que les familles recherchent dans leurs ancêtres, s’il n’y aurait pas une victime de la répression , autrement dit une victime de la République. Vieille tactique , quand elle est discréditée l’Eglise prétend être persécutée.
L’Eglise catholique à Lyon se trouve en grande difficulté du fait des scandales particulièrement nombreux. Face aux victimes des prêtres pédophiles couverts par le cardinal Barbarin, aux révélations stupéfiantes par les dominicains eux-mêmes de la gravité des viols commis par les frères Dominique et Thomas Philippe (communauté St Jean), après la chute de l’abbé Pierre de son piédestal sur le grand mur peint des grands hommes lyonnais, il faut bien restaurer l’image de l’Eglise. Mais est-ce le rôle du service public, en principe laïque, de servir cette triste opération?
Pourquoi France Info ne donne-t- pas la parole aux victimes actuelles de l’Eglise à Lyon?
2025 04 24 GROUPE RAISON ET VERITE DE VILLEFRANCHE SUR SAONE
- Écrit par BRUYERE
Groupe « Raison et Vérité » de Villefranche sur Saône.
Le grand livre des procès-verbaux de délibérations du groupe « Raison et Vérité » de Villefranche-sur-Saône a été déposé au siège de l’IRELP. Il couvre les délibérations de cette société de sa fondation le 12 juillet 1906 au 26 octobre 1914 et présente un ultime procès-verbal de septembre 1921. Pas de PV d'octobre 1914 à septembre 1921.
Il contient des témoignages sur les délibérations de cette société et sur ses liens avec les autres sociétés de Libre-Pensée de la Fédération du Rhône et avec celle des fédérations voisines de Saône-et-Loire et de l'Ain.
Témoignages précieux et souvent inédits : dans la mesure où ils ne sont pas couverts par les publications nationales déjà archivées à l’IRELP relatives à l’ANLPF et à la FFLP à cette époque.
La fondation de cette société – 1906 - fut l'aboutissement tardif d'une longue maturation, encouragée par les résolutions adoptées aux Congrès universels de l’AILP à Genève en 1902, à Rome en 1904 et à Paris en 1905, et par la participation de libres penseurs du Rhône, de l'Ain et de la Saône-et-Loire à ces congrès, ainsi qu’aux congrès nationaux tenus à Lyon en 1884, puis en 1890 et aux congrès régionaux, dont celui de Lyon en 1892. Le citoyen Deshaires, de Pont-de-Veyle (01), figure dans la liste des délégués aux congrès universels de Rome et de Paris.
La citoyenne Marie Boust, de Lyon, figure dans la liste des délégués à Paris 1905, ainsi qu'une dizaine de libres-penseurs du Rhône dont le professeur Vermare, conseiller général d'Oullins.
La société « Raison et Vérité » regroupait des libres penseurs de Villefranche-sur-Saône et de communes proches (Denicé, Lacenas. Liergues, Morgon, Pommiers). Elle entretenait des relations étroites avec Ars-sur-Formans, Bellegarde-sur-Valserine, Chalamont, Châtillon-sur-Chalaronne, Thoissey, Villars-les-Dombes dans l'Ain. Elle était ancrée dans la fédération du Rhône, aux côtés des sociétés de Lyon, de celles du Beaujolais (Brouilly, Chiroubles, Villié-Morgon), du Bois-d'Oingt, de Neuville-sur-Saône et de Vaugneray. Ses liens avec les sociétés de Libre-Pensée de la Fédération de Saône et Loire, qui aurait été une des premières fédérations de libre-pensée créées en France, semblent limités aux sociétés de Louhans et du Mâconais.
Les statuts adoptés le 5 juillet 1906 sont restés la référence jusqu'en 1921.
- Article 2 : propager et mettre en acte la philosophie rationaliste, c'est-à-dire le développement intensif d'une morale et d'une organisation sociale uniquement fondées sur une base égalitaire absolue pour l'un et l'autre sexe, sur la vérité scientifique de la raison.
- Article 3 : son action consiste en réunions, fêtes, collectes, conférences destinées à soutenir les écoles laïques et les œuvres démocratiques (…), assister ses membres dans leurs derniers moments (…), composer les cortèges civils (…), à condition de ne reconnaître aucun dogme, ne pratiquer aucune religion, d'avoir déposé un testament, de ne présenter ou de patronner officiellement des candidats aux élections politiques, ni d'être candidat, de verser un droit d'adhésion de 1F, plus une cotisation mensuelle de 0,5 F (…). Les enfants de 7 à 18 ans des membres du groupe sont agréés comme pupilles à la demande de leur parents (…). Le groupe est administré par une Commission Exécutive de 10 membres, renouvelables chaque année par moitié. La CE élit un bureau, un secrétaire, un trésorier, un archiviste. Ses réunions sont mensuelles.
- Les membres de la CE sont tenus à assister à toutes les Assemblées Générales (trimestrielles). La CE se prononce sur les demandes d'admissions, de radiations et d'exclusions. La CE est chargée d'organiser l'assistance aux sociétaires malades.
- Ont été élus comme secrétaires : Badin, Georges Mertz (1906-1913), Delplanche, François Guillermain, Georges Volland [en 1921 - ?].
- Ont été élus comme trésoriers : la citoyenne Hachette puis Melchior Hachette, Denis Juillard (section des pupilles), puis Antoine Jacquet qui fut aussi archiviste.
Chaque réunion de bureau a adopté les comptes-rendus des mandats, le rapport de trésorerie, le rapport de l'archiviste chargé de veiller au règlement des cotisations et à la rentrée des testaments.
Le compte rendu de mandat écrit de George Mertz, lu le 7 novembre 1913 en Assemblée générale, permet de préciser des engagements tenus par la société qui ne sont pas mentionnés ci-dessus :
- La participation à toutes les manifestations contre les guerres, contre les 3 ans, contre les bagnes militaires.
- La dénonciation des Libres-Penseurs « à la Poincaré » (sic) qui voulaient faire de la libre pensée « une chapelle de sectaires » (sic).
- L'aspiration à l'unité des frères libres penseurs fédérés ou autonomes « La Libre Pensée doit être unie, dans la rue, par les liens sacrés de la fraternité et de la solidarité, même si elle est divisée dans son sein», précise Georges Mertz.
Qu’en fut-il en réalité sur le terrain et en son sein ?
1906 : Les premiers pas de la société (4 nouveaux adhérents)
- 5 juillet : adoption des statuts, élection de la première Commission exécutive,
- 12 juillet : élection du bureau : Badin, la citoyenne Hachette, Melchior Hachette, Antoine Jacquet,
- 20 octobre : conférence de Humbert, sur « l'action sociale de la Libre Pensée », présidée par Antoine Jacquet
1907 : avec Georges Mertz, la société se développe.
G. Mertz est élu secrétaire en remplacement de Badin parti à Lyon. Notons qu'il n'est pas question d'un président de la société. La société organise une conférence avec la participation de trois orateurs, le 3 septembre, suivie d'une tombola.
- Lavis : « La Libre Pensée et la science »
- Borest : « La Libre Pensée et la famille »
- (?) « Charité chrétienne et charité bourgeoise ».
1908 : la société (45 adhérents) défend l'autonomie des sociétés de libre-pensée. Participation à 8 réunions de la Fédération LP du Rhône, inscription de 22 nouveaux adhérents.
- 27 janvier, 2 conférences : « questions sociales et questions religieuses » (Marie Boust), « Religion et libre-pensée » (Ponson)
- 7- 8 juin : participation au congrès de la Fédération LP de l'Est et sud-Est à Saint-Etienne, congrès où fut décidée l'organisation d'un congrès national au Puy-en-Velay pour 1909.
Y fut défendue et adoptée la proposition présentée par Marie Boust « que les groupes fédérés gardent leur autonomie complète pour ce qui concerne les admissions, les radiations, les exclusions », notamment pour ce qui touche les francs-maçons, que certains voulaient rejeter sous prétexte que la franc-maçonnerie serait une religion.
- 10 juillet : l'Assemblée générale décide de s'adresser aux pouvoirs publics pour les rappeler « aux pratiques fondamentales de la République », contre les atteintes graves à la liberté de penser portées par certains ministres et ratifiées par le Parlement, « pour que tout citoyen, fût-il fonctionnaire public, garde sa pleine indépendance dans l'exercice de ses fonctions. »
L'Assemblée décide d'offrir 3 prix aux 3 écoles laïques (un à celle des garçons, 2 à celles des filles).
1909 : 197 inscrits pour le Puy-en-Velay. 600 réunis à Ars, 33 nouveaux adhérents.
- De nombreux débats ont porté sur l'achat des draps mortuaires. Rouges pour les adultes, blancs pour les adolescents, blancs aussi pour les enfants.
- Décision fut prise de diffuser « La peste religieuse » (cf. Avenir socialiste n° 245).
- Participation massive au Congrès national du Puy-en-Velay les 29, 30, 31 mai. Les sociétés de Villefranche-sur-Saône et la Beaujolaise ont uni leurs efforts (197 inscrits par ces sociétés pour le train spécial).
- La fête laïque du 6 juin à Ars-Sur-Formans fut un nouveau succès contre la réaction cléricale : 52 groupes représentés, 600 participants. Un banquet et une conférence ont succédé au dépôt de gerbe sur la tombe d'un libre-penseur.
- Le 2 octobre, une conférence s'est tenue, organisée par le comité de défense des victimes de la répression en Espagne, avec la participation de la Beaujolaise et de la société de Villefranche.
1910 : Nouvelle bonne année pour les 85 Libres-Penseurs (17 nouveaux adhérents, 8 à la campagne, 10 en ville). La société a accompagné 18 enterrements civils, elle a participé au congrès fédéral de Valence (14-15 août 1910) et au Congrès départemental tenu à Villefranche-sur-Saône. Dès le 26 janvier, elle a participé à la fête organisée par la LP du 3e arrondissement de Lyon, suivie par une manifestation à Châtillon-sur-Chalaronne, puis à la manifestation à Pont-de-Veyle, ensuite à celle de Thoissey le 22 mai. Aide à la tenue de conférences à Bellegarde, Louhans et Nantua.
Le 20 juin, participation aux côtés de la LDH et du comité socialiste à une conférence organisée à Villefranche par le groupe de défense sociale.
Le 26 juin, participation à Lyon à une manifestation contre les bagnes militaires.
Le 14 août, participation à Vienne à la célébration de Michel Servet.
Le 4 octobre, fête à Pont-de-Veyle en l'honneur du député Baudin, avec la participation de Georges Mertz et de Melchior Hachette. Au chapitre de la solidarité, notons un versement pour les victimes d'inondations et une aide à une orpheline.
1911 :
19 mars : Conférence de Marie Boust sur l'intolérance cléricale et d'Antoine Jacquet. La société de Villefranche se prononce pour l'unité des libres-penseurs et contre les quêtes à domicile.
26 mars : 3 délégués avec le fanion pour manifester à Lyon.
4 avril : soutien au comité français pour la révision du procès Ferrer.
9 avril : Marie Boust et Georges Mertz sont délégués au congrès départemental de la LP à Oullins, mandatés pour y défendre l'autonomie des groupes fédérés.
28 mai : participation à la fête Jeanne d'Arc à Neuville, au défilé, au banquet, à la conférence. Affichage de nos affiches « Jeanne d'Arc brûlée par les prêtres. »
2 juin : participation au Congrès fédéral de l'Est et du Sud-est à Pont-de-Veyle.
2 juillet : 6 participants de la société de Villefranche au banquet, au défilé et à la conférence organisés à Neuville. Marie Boust et le citoyen Bonnet sont les conférenciers, défilé de 400 manifestants, banquet à 150 couverts.
13-14-15 août : 4 délégués de Villefranche au Congrès « national » de la LP à Lyon, auquel participent Marie Boust et le professeur Vermare, ainsi que Bazire, Prouvost, Hubbard et E. Noël.
15 octobre : inauguration du monument Servet à Vienne avec tous les fanions des sociétés LP de la région, 25 inscrits du groupe de Villefranche.
24 décembre : inauguration du monument Deshaires à Pont-de-Veyle. Marie Boust et Georges Mertz sont les orateurs. La fête est grandiose : 12 drapeaux en tête, suivis 600 délégués venus de tous les groupes de la région.
1912 : année marquée par la création de la section des Pupilles « L'avenir laïque », par le procès intenté par Georges Mertz, par l'organisation d'une souscription pour le soutenir contre l'abbé Huguet et le curé Vernet, et pour la participation à la souscription Dolet.
14 janvier : envoi de 5 participants à la fête des Libres- Penseurs du 3e arrondissement de Lyon en faveur de leurs pupilles.
24 janvier : rapport de G. Mertz pour la remise à l'État et aux départements de tous les édifices de cultes et de leur libre disposition en faveur des organisations philosophiques, politiques et syndicales.
10 mars : vote d'une délibération en faveur du respect des dernières volontés des défunts. François Guillermain est nommé secrétaire-adjoint.
4 août : adhésion au vœu contre le projet de loi d'institution d'une fête Jeanne d'Arc.
Le sénateur Beauvisage (du Rhône) participe au Congrès national de Lille.
Au bilan, 8 nouveaux sociétaires.
1913 : L'élan Libre-Penseur est stoppé. Les comptes-rendus sont marqués par le pessimisme du secrétaire qui souligne le peu d'empressement des sociétaires à assister aux réunions statutaires : assemblées générales et commissions exécutives. La CE du 10 juillet a été annulée ; 5 présents à celles de septembre et du 17 octobre. G. Mertz est malade. D. Juillard et Claude Descombes démissionnent de leurs fonctions sans démissionner de la LP. Toutefois, l'élan Libre-Penseur est stoppé. Le 9 mars, la CE est renouvelée : G. Mertz reste secrétaire, François Guillemain secrétaire-adjoint, Melchior Hachette trésorier. Parmi les autres membres figurent Marie Boust, la citoyenne Hachette, Antoine Jacquet, Denis Juillard, Claude Descombes. Les délibérations rapportées indiquent des engagements limités, conséquence de la maladie de G. Mertz à partir de l'été 1913.
- Conférence de Jules Claraz, le 26 février.
- Versement de 10 francs pour le monument Dolet à Lyon le 9 mars.
- Délégation à Ars-sur-Formans.
- Organisation d'une tombola, tirage en juillet.
- Organisation d'une fête de la solidarité laïque de la Libre Pensée de la région au profit de la section des Pupilles « L’avenir laïque », le 8 juin, pour le 4e anniversaire de la première manifestation d'Ars.
- Procès Mertz contre deux ecclésiastiques (l’abbé Huguet et le curé Vernet).
L'animation de la société dépend dès lors de François Guillermain, des époux Hachette et de Marie Boust, « toujours prête ». L'adhésion de 5 nouveaux membres semble devoir plus, à la retombée des congrès nationaux de Lille ou de La Rochelle qu’au dynamisme de la société de Villefranche et de la fédération départementale animée alors par Marius Roche et par le sénateur Georges Beauvisage.
1914 : L'effondrement en cours de la LP « opérative » a été accéléré par la guerre. Le « vénéré secrétaire » Georges Mertz est mort. La société organise une souscription pour l'érection d'un monument sur sa tombe.
François Guillermain prend le relais. Il sera secrétaire jusqu'en 1921, secondé par Denis Juillard et Georges Volland.
Les instances continuent à être désertées : 15 présents le 4 juin, 7 présents le 6 septembre, 3 le 11 octobre, 5 le 14 octobre, 5 le 19 octobre. Pas de PV de la CE du 5 avril, aucune instance rapportée à partir d'octobre.
Les délibérations portent sur :
- « Que faire pour les membres sous les drapeaux ? »
- La souscription pour le monument Mertz.
- La souscription pour le monument Deshaires à Pont-de-Veyle.
- La proposition de tenue d'une réunion par Lorulot.
- La participation au congrès fédéral du Bois d'Oingt (3 délégués prévus, dont Marie Boust), le 5 juillet.
- Aide une pupille de la Ruche de Sébastien Faure à Rambouillet.
- La proposition de fusion des fédérations du Rhône et de la Saône-et-Loire formulée par Marius Roche, proposition acceptée.
- Pose d'une couronne sur la tombe du caporal Thierry Jules, enterré civilement, blessé mortellement sur le front.
1915-1921 : la LP opérative est « en berne ».
Du 25 octobre 1914 au 6 septembre 1921, François Guillermain, secrétaire, ne rédige pas de procès-verbal. Le redémarrage en 1921 est lent : 7 présents à l'Assemblée du 6 septembre avec François Guillermain, D. Juillard, Georges Volland et Victor Liégeon. On est loin des années Mertz-Boust-Deshaires !
Il n’en fut pas dans ce département comme dans celui de l'Oise où Emile Marielle a maintenu la fédération LP durant les années de guerre (témoignage d’André Lorulot).
Louis couturier, Pierre Girod, janvier 2025
SOURCES BIBLIOGRAPHIQUES
- La LP du Rhône, numéro 1 de 1912.
- Lyon républicain.
- Le réveil (journal clérical)
- Le courrier du Beaujolais.
- L'avenir socialiste.
- La libre pensée en Haute-Loire 1850-1940, L'anticléricalisme (Georges Chanon) pour ce qui se rapporte à Jules Pontvianne et au congrès du Puy.
- Le libre penseur du centre et de l'Ouest pour les comptes-rendus des congrès nationaux de Lille 1912, La Rochelle 1913.
- Bulletin mensuel de la FFLP, compte-rendu officiel du Congrès de Paris, 3-7 septembre 1905, archives IRELP.
2025 03 LE COUT D UN MISSILE
- Écrit par BRUYERE
Modestes propositions pour faire des économies
Et exporter la mort
Quelle connerie la paix !
(un poète anonyme)
Nous traversons une grave crise financière, comme on nous l’explique chaque jour. Et avec la guerre en Ukraine, nous sommes loin d’avoir levé les fonds nécessaires. C'est pourquoi nous devons réfléchir à des sources d'économie innovantes. Or, c'est un grand problème dans ce pays, les enfants scolarisés dans notre système d'éducation coûtent trop cher, même si on les aime bien. Tout cet argent gaspillé, quel crève-cœur !
Songez que la dépense annuelle par élève ou apprenti dans les premiers ou 2nd degrés est de 9300 €. Un élève de moins et cela permettrait presque de financer l'achat d'un missile antichar Malyutka (10024€). Pour un élève de lycée (11 940 €) on arriverait presque à se payer un missile Konkurs (13 000 $). Ce serait même tout à fait possible en faisant disparaître un élève de lycée professionnel (13 760€).
Bien sûr, nous sommes loin du coût d'un missile sol-air à très courte portée mistral 8 qui est un produit français dont nous sommes fiers, et dont le coût unitaire est de 41000€ pour le poste de tir portable et de 160 900€ pour la munition. Avec ces tarifs, c'est presque une classe entière qu'il faudrait faire disparaître. Mais l’enjeu en vaut la chandelle.
Certes, il est une autre source d'économie possible : c'est de toucher aux postes d'enseignants. Quand on songe que chaque année le coût d'un stagiaire à temps plein est de 13308 € dans le primaire comme dans le secondaire, on imagine le montant de l’économie à réaliser. Un professeur des écoles ou un certifié en fin de carrière nous coûte 30 056 €. Ce n'est pas négligeable. Et si on parle des agrégés, alors là bingo ! Le traitement d'un stagiaire annuel est de 26 868 € et au 11e échelon : 49 320 € pour l'année. Huit postes comme ça en moins et on peut s‘offrir un missile air-air à courte portée AIM-9X block II "Sidewinder" (409 300 €).
Un tel missile détecte ses cibles par la chaleur. Il est particulièrement efficace en combat air-air rapproché, et peut être embarqué sur de nombreux appareils, dont des hélicoptères. Pourquoi se priver ?
Ces solutions paraissent si évidentes qu'on s'étonne que personne ne les ait proposées.
Quoique… P.G.
2025 03 LE DRAPEAU ROUGE A LYON
- Écrit par BRUYERE
LE DRAPEAU ROUGE A LYON
Les Lyonnais savent peu que le drapeau rouge a flotté durant six mois pleins sur l’Hôtel de Ville, du 4 septembre 1870 au 3 mars 1871, sans compter un épisode plus tardif, de moins de 48 heures, au moment de l’insurrection parisienne. Moins encore que drapeau flottait dans les localités circonvoisines. Rien à ce jour ne rappelle ces événements. Et pourtant le drapeau rouge … flottait partout.
Depuis la fin du XIXe siècle, ce drapeau a cristallisé l’essentiel des luttes politiques.
En 1871, le drapeau tricolore est devenu l’emblème des versaillais, alors que le rouge devenait clairement celui de la révolution sociale. Puis il s’est affirmé comme celui du socialisme international. Il l’est toujours, et l’on chante toujours Le Drapeau rouge de Paul Brousse (« Regardez, regardez, le voilà… »). Il fut brandi au Congrès général des organisations socialistes françaises, le 3 décembre 1899, salle Japy, quand fut chantée pour la première fois L’Internationale.
Ce n’est pas par amour de l’émeute et des étendards, écrit Jean-Baptiste Clément, que j’arbore ici le drapeau rouge des revendications sociales qui flotta victorieux pendant plus de deux mois à l’Hôtel de Ville de Paris en 1871, après avoir été mitraillé en juin 1848 par les bourgeois multicolores. Loin de disparaître, il se redresse plus écarlate que jamais après chaque étape de nos luttes sociales […] Il plane victorieux, non seulement sur Paris, mais sur le monde entier, car on le voit de partout. Les bourgeois lui ont signé sa feuille de route par les massacres de juin 1848 ; aujourd’hui il est en train de faire son tour du monde.
Le drapeau rouge fut déployé sur les barricades de 1848 et sous la Commune de 1871.
Depuis longtemps le pavillon rouge avait été brandi lors de manifestations ouvrières. Sa première utilisation est attestée en 1768 lors de la grève des ouvriers du port de Londres. Le rouge est la couleur du sang, qui coulait à l'exécution d'une « peine afflictive » sur les navires, en punition d'un fait grave. Les prolétaires ont adopté ce symbole.
Mais il y eut autre chose : lors de la Révolution française, par la loi du 21 octobre 1789, le drapeau rouge était déployé par la troupe comme ultimatum avant une intervention imminente. Après quoi on ouvrait le feu sur les manifestants. C’est ainsi qu’il fut déployé au Champ-de-Mars, lors de la fusillade du 17 juillet 1791,
C’est après la Commune de Paris de 1871 que le drapeau rouge est devenu le symbole de la révolution socialiste et de l’internationalisme ouvrier, alors que le drapeau bleu-blanc-rouge représentait la répression bourgeoise. Il était devenu le drapeau des socialistes pendant la révolution de 1848, au cours de laquelle il fut proposé comme emblème de la République. Une tentative eut lieu pour l’imposer, avec quelque chance de succès dans un premier temps, lorsque la foule envahit l'Hôtel de Ville en criant : « le drapeau rouge ! ». C’est alors que Lamartine se fraya un passage, harangua la foule et permit au drapeau tricolore d’être adopté. Il faut souligner que pour les révolutionnaires, le drapeau rouge n'était nullement un insigne de terrorisme et de vengeance, mais l’emblème de l’unité d’une société nouvelle. Il n'était pas le drapeau du sang, mais celui de l'utopie.
Oscar Testut rapporte qu’en 1866, lors du congrès de Genève, en tête de la colonne des délégués se rendant à la salle du congrès était porté un drapeau rouge ou était inscrite la devise de l'association internationale : « Pas de droit sans devoir ». Et lors du meeting parisien du 24 février 1868, le drapeau rouge était présenté comme « symbole de la révolution prochaine ». On vit alors s'avancer une députation de la société ouvrière allemande portant un drapeau rouge qu'elle plaça près de la tribune au milieu des cris de « Vive la République démocratique et sociale ! » Testut, historien malveillant de la première Internationale et indic de police, n’aura de cesse de flétrir « cette hideuse loque rouge qui a flotté sur le dôme de l'hôtel de ville pendant plus de 6 mois et que l'on retrouve encore à la mairie de la Guillotière la veille de l'insurrection du 30 avril. »
« Hideuse loque rouge ! » On trouve de tels expressions ordurières chez les principaux témoins. Joannès Guetton, très clérical auteur des « Six mois de drapeau rouge à Lyon » emploie la même expression et d’autres telles que « fanion du crime et de l’insurrection »ou « trophée boueux ». Il est vrai que son drapeau à lui n’est ni tricolore ni rouge, mais « l’étendard de la Croix ». La bourgeoisie a les moyens d’écrire, ce ne sera guère le cas des communards. C’est un problème pour l’histoire de toute la Commune de Lyon : les ouvrages qu’on nous a laissé sont l’œuvre, pour la plupart, d’ennemis déclarés de l’insurrection populaire,
Communes de 1870-1871
Et oui, Communes au pluriel, et dès 1870 !
Le 18 mars 1871, sur la Butte Montmartre, commence la Commune de Paris. Rapidement les Communards décident la promulgation du drapeau rouge comme drapeau officiel, (alors que le drapeau rouge et noir est utilisé par certains anarchistes).
Pourtant c’est l’année précédente, le 4 septembre précisément, que pour la première fois le drapeau rouge est hissé sur un bâtiment officiel. Dès le matin, du balcon de l’Hôtel de Ville, siège de la préfecture et de la commission municipale (imposée, à Lyon comme à Paris, en vertu d’une loi d’exception), la République et la Commune libre sont proclamées d’un même mouvement. Le Comité de salut public déclare : « Les malheurs de la patrie nous dictent notre devoir. Nous décrétons immédiatement l'armement de la Nation, la déchéance de l'Empire et la proclamation de la RÉPUBLIQUE. »
Guetton rapporte les faits ainsi, minimisant sans doute l’affluence populaire :
« L'effervescence augmente. Par la rue Romarin débouche une troupe d'individus portant un petit drapeau rouge. On entend, sur plusieurs points, des cris de : Vive la République ! Un rassemblement d'une centaine de personnes parcourt la rue Impériale (nom de l’actuelle « rue de la Ré »), se dirigeant vers la préfecture et chantant la Marseillaise. Vers dix heures, la foule qui n'a pas cessé de grossir, force l'entrée de l'Hôtel de Ville. Au bout de quelques instants, le tocsin sonne. Un citoyen escalade le beffroi pour détrôner le drapeau tricolore (…) en plaçant une loque rouge à l'un des oeils-de-boeuf du beffroi. Un second citoyen, plus heureux, parvient à descendre le drapeau tricolore, dont on enlève les deux couleurs blanche et bleue pour ne laisser subsister que le morceau rouge, qui apparait enfin et flotte au sommet de la préfecture. Le grand balcon, au-dessus de la porte d'honneur de l'Hôtel de Ville, est envahi par trente ou quarante citoyens qui, tous à la fois, déclarent l'Empire déchu et la République proclamée. Les acclamations de la foule leur répondent. De nombreuses cocardes rouges commencent à fleurir aux boutonnières des habits. »
On lisait dans Le 1er n° de l’Antéchrist, journal libre-penseur, le 15 octobre 1870 : « Des préjugés regrettables, propagés par la malveillance, persistent à présenter le drapeau rouge comme un emblème de désordre et de terreur. (…) Cette opinion est née d'une interprétation inexacte des querelles de nos assemblées de la Révolution, elle a été consacrée par le mot si faux et si applaudi de Lamartine. (…) Le Drapeau Rouge, pendant notre grande Révolution, n'a jamais été que l'insigne de la force militaire déployée soit pour le maintien de l’ordre intérieur, soit pour l'expulsion de l'étranger. (…) Il est pur de toute tache, de toute honte, de tout mélange. »
Le mercredi 28 septembre, vers midi, une immense colonne de milliers d'ouvriers débouchait par la rue Puits-Gaillot, sans armes, portant un drapeau rouge frangé d'or ; Saigne et Cluseret en tête, accompagnés des orateurs de la Rotonde, la grande salle des meetings populaires, aujourd’hui disparue. Ces 6 à 8000 ouvriers venaient demander des augmentations de salaire. C’est ce jour-là, à la faveur de cette mobilisation sociale, que les manifestants réunis derrière Bakounine s’emparaient de l’Hôtel de Ville et proclamaient « l’abolition » de l’État bourgeois, afin de lui substituer un État révolutionnaire, reposant sur une Convention révolutionnaire du Salut de la France constituée des délégués de chaque département. On sait que cette tentative fit long feu et finit en débandade.
Aux yeux du préfet Challemel-Lacour, le drapeau rouge de l'hôtel de ville était « un défi à la République et au bon sens ». Il n’était pas le seul à s’en scandaliser, rejetait la faute sur les internationalistes (lettre à Delescluze du 13 septembre 1870) mais demeurait impuissant. Même Andrieux, partisan de l’ancien drapeau national, le reconnaît : le préfet exagérait l’importance de l’AIT au sein du Comité de Salut Public et dénaturait la signification du drapeau rouge, « symbole de la Commune et de la révolution sociale bien plus que le signe des revendications internationalistes. » Quant au Conseil municipal nouvellement élu au , il s’efforçait déjà d’atténuer la signification du drapeau rouge, faisant afficher le 24 septembre : « Considérant que, le 4 septembre en face de la France envahie, la ville de Lyon a proclamé la Patrie en danger, et en arboré le signe ; considérant que le péril est plus grand que jamais, délibère : Le signal de la patrie en danger restera arboré sur l'hôtel de ville jusqu'à ce que le péril ait cessé. » Par la suite l'argument de la patrie en danger allait permettre de repousser toute objection contre le drapeau de la Commune, nonobstant les tiraillements internes du Conseil.
Peu de jours après l’arrivée à Lyon du nouveau préfet, un garde national menaçait d’abattre quiconque toucherait au drapeau, ajoutant : « C’est notre consigne », signe d’une tension qui ne faiblit pas et du peu d’autorité détenu par le pouvoir central. Andrieux rapporte encore que le 17 novembre le général Bressoles avait fait enlever un drapeau rouge qui décorait le fortin des Mercières, récemment achevé, au chantier national. Il s’ensuivit une grande agitation parmi les ouvriers des chantiers, et le préfet dut intervenir.
La proposition du retrait revint régulièrement en débat au Conseil municipal, appuyée par le nouveau préfet Valentin (nommé le 4 février 71). Mais chaque fois jusqu’au 3 mars, la légitimité du drapeau est confirmée.
Le 14 février, l’ancien révolutionnaire Joseph Benoit demande son retrait, en précisant que le drapeau rouge sera déposé aux archives de la ville. Barodet, futur maire de Lyon, propose que les deux drapeaux, le rouge et le tricolore, flottent de conserve. Il devait plus tard déclarer, lui traditionnel partisan du drapeau rouge, que sa proposition avait été « aiguisée en paratonnerre pour dégager l’électricité populaire et conjurer l’orage. »
Le 18, le Conseil vote pour la quatrième fois le maintien du drapeau rouge ; puis le 23, une cinquième fois.
Enfin, le 3 mars, il est décidé que le drapeau rouge cessera de flotter sur l'Hôtel de Ville. Il y sera resté six mois jour pour jour et sera remplacé par le drapeau tricolore, et pendant trois jours par un drapeau noir en signe de deuil. Au soir, on en lisait l’annonce placardée sur les murs de la ville. La délibération du Conseil municipal, adoptée à l’occasion des préliminaires de paix avec l’armée prussienne, mérite d’être reproduite :
« Le Conseil municipal,
Vu l'acceptation des préliminaires de paix par l'assemblée réunis à Bordeaux ;
Considérant que le sacrifice et l'humiliation qu'il s'agissait d'épargner à la France sont maintenant consommés, et que les patriotiques espérances dont le drapeau rouge était l'emblème se trouvent, par le fait du traité de paix, ajournées à des temps meilleurs ;
Considérant d'ailleurs qu'il est bon de faire disparaître tout ce qui peut être à un titre quelconque une cause de division entre tous ceux qui veulent sincèrement la République ;
Délibère :
ARTICLE PREMIER. - le fier drapeau de la Patrie en danger et de la résistance à outrance ne survivra pas à l'humiliation de la France ; le drapeau rouge de la Commune de Lyon cessera de flotter sur le dôme de l'hôtel de ville à partir du 3 mars 1871.
ART. 2. - Le drapeau noir sera hissé pendant 3 jours au balcon de l'hôtel de ville en signe du deuil de la patrie mutilée. »
On retiendra que les espérances sont « ajournées à des temps meilleurs » et on constatera que la délibération fait silence sur l'installation du drapeau tricolore. Qu’en conclure si ce n'est que, comme l'écrit Andrieux, « pour les exaltés des quartiers révolutionnaires, la destinée de la République semblait liée à la couleur du drapeau » ?
… Mais le drapeau réapparaîtra une dernière fois, pour un peu moins de quarante-huit heures : le 22 mars, alors que quatre jours auparavant l’insurrection parisienne vient d’éclater, un comité de salut public nouvellement élu fait apporter un immense drapeau rouge, qu’on est parvenu à se à se procurer « au prix de mille peines » et on invite les curieux à aller se coucher, pendant que le comité « veille au salut de la France ». Le lendemain le drapeau flotte sur le beffroi de l'Hôtel de Ville et sur le balcon de la place des Terreaux. Mais la tentative des « communeux » tourne court. Le 25 au matin, le drapeau a disparu, par suite de l'arrivée des mobiles de Belfort et l'échec de l'insurrection. Il sera resté moins de 48 heures, remplacé par le drapeau tricolore.
Ce sont des faits divers qui permettent d’imaginer à quel point le drapeau rouge était partout présent pendant toute cette période de la Commune, au fronton des mairies, aux fenêtres, aux balcons ou en tête des innombrables manifestations. L'affaire de Vaugneray, très étonnante, est révélatrice : à la mi-juillet 1871, le curé du village demande à Louis Andrieux de faire procéder à l’enlèvement du drapeau sur le clocher de son église. On apprend, par le récit qu’en fait Andrieux, qu’un juge conservateur avait lui-même acheté l'étoffe et l'en avait distribué à toutes les communes du canton après le 4 septembre, dans l'intérêt de l'ordre et sur toutes les églises ! Mesure d’apaisement opportuniste ou conviction politique assortie d’anticléricalisme ?
Autre
anecdote : le 30 janvier, Challemel-Lacour fut mis en difficulté à la tribune de l’Assemblée nationale pour des propos scandaleux sous la plume d’un préfet (ils ne le seraient plus au temps des Versaillais) : « Fusillez-moi tous ces gens-là ». Il s’agissait d’un bataillon de mobiles envoyés dans le village de Vénissieux où ils s’étaient mal conduits, « ne respectant ni les femmes, ni les poulaillers, ni la République » au témoignage du maire de la commune. Mais on apprend incidemment – et c’est sans doute ce qui a le plus choqué le maire – que les mobiles avaient été envoyés pour enlever le drapeau rouge qui flottait sur la mairie ! C’est donc ce fait-divers qui nous apprend la présence du drapeau dans ce village tranquille, bien différent du Vénissieux d’aujourd’hui, aussi bien qu’à Lyon et probablement dans bien d’autres lieux publics et chez des particuliers.
Le 30 avril 1871, lorsque la commune de Lyon s'acheva dans le sang, c'est encore le drapeau rouge qui flottait sur sur la mairie de la Guillotière.
2025 01 Jean-Jacques Rousseau à Lyon : encore un « abusé de l’Eglise »
- Écrit par BRUYERE
Jean-Jacques Rousseau à Lyon : encore un « abusé de l’Eglise » ?
En 1830, âgé de 20 ans, le jeune Jean-Jacques Rousseau se trouve à Lyon. Ses mésaventures dans notre ville sont narrées dans un numéro des « Rues de Lyon » (n° 112, avril 2024 – « Les mésaventures lyonnaises du promeneur solitaire »). La BD reproduit la rencontre qu’il a eu avec un prêtre libidineux. Comme quoi lcertains invariants traversent les siècles. Il nous a paru intéressant de rapporter cet épisode tiré du livre IV des « Confessions ».
Rousseau raconte d’abord, en termes pudiques, comment un homme l’avait déjà abordé place Bellecour, venant s’asseoir à ses côtés pour assez vite lui proposer de « s’amuser de compagnie ». Le futur philosophe attendit de savoir quel était cet amusement, et, dit-il, « sans rien ajouter, il se mit en devoir de m'en donner l'exemple. Nous nous touchions presque, et la nuit n'était pas assez obscure pour m'empêcher de voir à quel exercice il se préparait. » Jean-Jacques s’enfuit à toutes jambes.
Peu après, il a une aventure du même genre, qui le met en plus grand danger. A bout de ressources, il se résout à passer une nuit à la belle étoile. Laissons-lui la parole :
« … déjà je m'étais établi sur un banc, quand un abbé qui passait, me voyant ainsi couché, s'approcha, et me demanda si je n'avais point de gîte. Je lui avouai mon cas, il en parut touché. Il s'assit à côté de moi, et nous causâmes. Il parlait agréablement : tout ce qu'il me dit me donna de lui la meilleure opinion du monde. Quand il me vit bien disposé, il me dit qu'il n'était pas logé fort au large ; qu'il n'avait qu'une seule chambre, mais qu'assurément il ne me laisserait pas coucher ainsi dans la place ; qu'il était tard pour me trouver un gîte, et qu'il m'offrait, pour cette nuit, la moitié de son lit. J'accepte l'offre, espérant déjà me faire un ami qui pourrait m'être utile. Nous allons. Il bat le fusil [i.e. : il allume un briquet]. Sa chambre me parut propre dans sa petitesse : il m'en fit les honneurs fort poliment.
(…) Soit que, sachant que je pouvais être entendu, il craignît de me forcer à me défendre, soit qu'en effet il fût moins confirmé dans ses projets, il n'osa m'en proposer ouvertement l'exécution, et cherchait à m'émouvoir sans m'inquiéter. Plus instruit que la première fois, je compris bientôt son dessein, et j'en frémis. Ne sachant ni dans quelle maison ni entre les mains de qui j'étais, je craignis, en faisant du bruit, de le payer de ma vie. Je feignis d'ignorer ce qu'il me voulait ; mais, paraissant très importuné de ses caresses et très décidé à n'en pas endurer le progrès, je fis si bien qu'il fut obligé de se contenir. Alors je lui parlai avec toute la douceur et toute la fermeté dont j'étais capable ; et, sans paraître rien soupçonner, je m'excusai de l'inquiétude que je lui avais montrée sur mon ancienne aventure, que j'affectai de lui conter en termes si pleins de dégoût et d'horreur, que je lui fis, je crois, mal au coeur à lui-même, et qu'il renonça tout à fait à son sale dessein.
(…) Comme à Paris, ni dans aucune autre ville, jamais rien ne m'est arrivé de semblable à ces deux aventures, il m'en est resté une impression peu avantageuse au peuple de Lyon, et j'ai toujours regardé cette ville comme celle de l'Europe où règne la plus affreuse corruption. »
2024 10 AFFAIRE RIBE ET VITRAUX DE ST MARTIN
- Écrit par BRUYERE
Une rencontre a eu lieu le 29 octobre 2024 à 14:30 à l’école de St Martin de Cornas.
Étaient présents : Annick Moulin, Elisabeth Bazin et Luc Gemet représentant le collectif
Solange Fornengo présidente, la trésorière, la secrétaire et 2 adhérents de l’association de sauvegarde du patrimoine de St Martin.
Après une présentation et un historique du collectif et de l’association, nous sommes entrés dans le vif du sujet : les vitraux de RIB : pourquoi voulons-nous qu’ils soient déposés (et aussi détruits mais chaque chose en son temps)
Les échanges ont duré 2h30 et nous pouvons nous targuer de maigres avancées :
- les personnes présentes ne remettaient pas en cause la nécessité d’apporter une réponse et une compensation à ce que nous avons vécu
- cependant la dépose des vitraux n’est pas envisagée.
La raison n’a pas été exposée clairement.
Ce n’est paraît-il pas une question d’argent puisque l’association ne souhaite pas que (comme le diocèse s’y était engagé) la partie financière soit prise en charge par l’église.
Pourtant l’argument avancé par l’association de préservation du patrimoine, c’est que des personnes membres de l’association de préservation du patrimoine ayant versé des sommes importantes pour rénover ces vitraux, leur remplacement n’etait pas envisageable.
Le collectif pense que ce remplacement marquerait un geste fort pour La Défense des victimes de RIB et pour le respect des victimes de pedocriminalité.
Tout comme dans l’affaire abbé Pierre, on change le nom de l’association (abbé Pierre), on change le nom des rues, des places, on efface les portraits,on démonte les statues.
Pas d’honneurs, pas d’hommage pour les pedocriminels, notre combat est légitime !
La présidente a néanmoins concédé à enlever un vitrail sur les 3 de RIB. Ce vitrail serait celui qui représente un enfant nu de dos (agressé sexuellement par RIB).
C’est pour nous insupportable que l’on préfère conserver ces tableaux, ces vitraux.
Mais il faut rester raisonnables, c’est ce que nous suggèrent l’asso du patrimoine et la société française toute entière.
Nous avons donc laissé la balle à l’association du patrimoine qui est dans leur camp désormais. À eux de colporter notre vision et de changer (si elles ils le souhaitent vraiment) les choses.
Tout cela est tellement trop long pour nous…
Nous attendons leur retour pour janvier 2025…
Et je (nous) restons convaincus que rien ne change en France pour la protection des survivantes que nous sommes, pour les survivants que nous sommes mais aussi pour les enfants victimes aujourd’hui de maltraitantes sexuelles…
Ou en tous cas pas assez.
Pour ceux qui gardent un souvenir amer, une colère envers l’INIRR, une manifestation a eu lieu devant la conférence des évêques de France à Paris le samedi 16 novembre 2024 à 14:30.
Notre colère est légitime et n’empêche pas les démarches de reconnaissance et de réparation auprès de l’INIRR.
Les organisateurs (Yolande Dufayet, Francois Devaux / la parole libérée/De la parole aux actes) nous ont permis de rencontrer d’autres associations de victimes, d’autres victimes et mettre en commun nos expériences et nos ressentis.
Pour les vitraux :
- le chantier de Charly est terminé, les vitraux sont remplacés
- Pour Caluire et Loire sur Rhône ,le maître verrier a commencé la réalisation des vitraux de Caluire. Le service communication nous informera et nous conviera lorsqu’ils seront posés. Suivra ensuite Loire sur Rhône…
À ce propos, le diocèse peut prendre en charge les frai s de déplacements pour les trajets que vous engagez pour vous rendre au rendez vous fixés par le collectif (St Martin de cornas, rdv vitraux, etc…)
Nous souhaitons toujours désinscrire les productions de RIB au titre des monuments historiques (Chambost-Allieres). Pour l’instant le ministère de la culture et la DRAC font la sourde oreille, nous prenons ça pour du mépris.
Toutes ces démarches, toutes ces actions n’ont qu’un seul but : nous faire sortir de notre statut de victimes, nous rendre notre dignité.
(Pour le collectif) Luc Gemet
